AMERIQUE Canada JOURNAL DE VOYAGE Montreal

Mon 375ème Montréalais

Après un périple de six mois en Floride, au Pérou, et en France, me voilà de retour (enfin!) à Montréal.

En vadrouille depuis six mois, c’est au tour de Charlotte de m’accueillir chez elle, après Alex, le Krepoursi, Richard, Rohan… Être nomade, c’est aussi ça, compter sur l’hospitalité de ses proches. (J’vous aimes les gars!)

Nous sommes le 17 mai, et c’est la première journée de chaleur de l’année : 30 degrés, 37 ressentis. Je suis joie. Il fait chaud, les jupes sont courtes, les débardeurs de sortie. Un père se promène avec ses filles en maillot de bain, en pleine rue. Une jeune femme en robe courte attend sur son vélo que le feu passe au vert, pendant qu’une autre jeune femme voilée intégralement traverse la route.

Le marché Jean Talon, ma place préférée à Montréal, est découvert. C’est l’été. Ma fleuriste, ou marchande de fleurs, préférée me dédicace son livre sorti au début du mois, et l’emballe dans le poème de la veille : des poèmes, des photos, tout ce que j’aime.

Le marchand de smoothie me demande, avec un sourire chantant et des yeux rieurs si j’aime la menthe, un peu ou beaucoup, si j’en veux moins, ou plus. Chez Alfalfa, un client entre pour me dire qu’il adore mes cheveux. Puis la dame qui nous fait traverser la route au passage piéton. C’est au moins la dixième fois de la journée, et ça fait du bien.

Puis, si je suis rentrée ce jour là, c’est parce que bon, certes à un moment donné il faut bien rentrer à la maison, mais aussi et surtout parce qu’il y avait la soirée d’annonce des lauréats de la bourse d’exploration en terres solidaires organisée par Village Monde. Pour la petite histoire, nous sommes le 5 avril lorsque je vois passer le retweet de Curieuse Voyageuse:

Je clique, je lis la description du poste : on est d’accord, j’ai tout ce qu’il faut. Je lis le règlement en entier : « modalités de participation : Les candidats devront réaliser une vidéo de deux minutes maximum expliquant pourquoi ils sont le candidat idéal en respectant les conditions énoncées dans les règlements présentés dans ce document. » Bien, ça, ça ne va pas le faire. Je passe à autre chose, tout en gardant l’onglet ouvert dans mon navigateur. Les jours passent, dont le 7 avril, et je me dis qu’il faudrait peut-être arrêter avec les conneries de timidité et de complexe de ma voix. Je commence à remplir ma candidature, répond consciencieusement aux questions très complètes, et l’envoie le 11 avril.

Cependant, je ne suis toujours pas super chaude pour la vidéo… Au dernier mail de relance de la part de Village Monde, le 20 avril, je relis le règlement, puis la mission de Village Monde. Non, cette mission me correspond vraiment trop pour laisser la timidité prendre le dessus! Je me souviens à ce moment là de quelques paroles de Féfé, trois ans auparavant : « Il faut qu’on te voit, il faut qu’on t’entende, je pense que c’est ce qui touchera le plus les gens parmi tout ce que tu fais »… Je me met un coup de pieds aux fesses et je préviens Richard :

« Mec, j’ai trois jours pour faire une vidéo et il faut qu’elle défonce, je vais peut-être avoir besoin de toi pour me filmer. J’veux qu’on me voit marcher là, puis là avec des chaussures différentes, puis à la fin je veux qu’on m’voit remettre ma veste, et me retourner, tu vois, un truc qui pète. Et je ne veux pas parler face caméra, ça sera chiant et j’ai peur. Puis j’aimerai qu’on entende ci, et ça, et puis que ça ne dure pas longtemps, genre à la fin, on en veut encore, mais en même temps, on a eu le temps d’en voir, tu vois? » Il voit.

En attendant, j’écris mon texte. Une fois. Deux fois. Dix fois. Jusqu’à le réduire à son maximum tout en gardant un rythme où les mots chantent. Richard m’écoute et me conseille. Quelle est la plus belle rime, quel mot on peut utiliser pour éviter de le dire trois fois, est-ce que cette phrase est nécessaire, etc etc. À la fin, une minute vingt de diction. J’enregistre.

Puis, en fouillant tous nos rush de voyage, j’ai assez d’images, nous n’aurons pas besoin de filmer. Je commence à monter. J’ajoute une musique, Wanderlust de Ill-esha featuring Zipporah, presque comme une évidence. Sly regarde, écoute, me fait reposer ma voix en me coachant rapidement, et la mix pour corriger les bruits, le son, le ton.
« Hé, tu peux faire un truc pour que ma voix ne soit pas grave genre? »
« Oui, je peux, mais c’est ta voix, elle est comme ça, et tu vas l’accepter. »
-_-

Richard me donne ses derniers conseils, principalement par rapport au rythme des images, de la musique et des paroles. Katoucha m’envoie mon texte traduit. J’ajoute les sous-titres. Je laisse reposer. Je la regarde le lendemain, une fois. Richard, dix (cent?) fois. Il valide. Je fini par m’habituer à ma voix. Je valide. J’envoie.

Le 23 avril, ma candidature est complète, j’ai un peu peur, j’appréhende, et suis impatiente en même temps. La vidéo est publiée, mes amis et contacts jouent le jeu, aiment, commentent, partagent. Le 9 mai, je reçois un mail m’annonçant que je fais partie des finalistes. Le 12, que je suis lauréate, aux côtés de dix autres explorateurs et exploratrices. Deux mois que je suis en France, il est temps de rentrer. Je prend mon billet d’avion. Je suis excitée, mais pas tant, car je ne réalise pas encore.

Nous pouvons maintenant revenir à cette journée du 375ème de Montréal, où la soirée d’annonce des lauréats a lieu :

Assistez au dévoilement en direct des lauréats pour une bourse d'#explorationsolidaire avec Mylène Paquette, la Fondation Air Canada, le CECI – Centre d'étude et de coopération internationale et LOJIQ – Les Offices jeunesse internationaux du Québec.

Gepostet von Vaolo am Mittwoch, 17. Mai 2017


À 40 minutes 40, mon nom est annoncé, ainsi que ma destination : le Laos. Six semaines, en septembre et octobre! Et comme vous pouvez le voir dans la vidéo, à ma plus grande surprise (et accessoirement gêne), ma vidéo a été mise à l’honneur et diffusée entièrement pendant la soirée. Vidéo dont je recevrai beaucoup de compliments par la suite.

Et en fait, si j’ai tant insisté sur tous ces détails de participation, c’est parce que je suis toujours autant surprise, et même amusée, de constater que c’est souvent ce qui nous effraie le plus qui fonctionne le mieux, que c’est souvent ce que nous détestons le plus chez nous qui plaît et touche le plus les autres. Et que ça soit tout le temps vrai, ou non, c’est ce genre d’histoires qui me conforte à faire, encore et toujours, ce qui me fait vibrer, peu importe les défis effrayants que je dois relever.

Pas le temps de me remettre de mes émotions, je retrouve ma soulsista, quittée la veille. Enfin, c’est tout comme. Bouffe, histoires de filles, de femmes, illuminations du pont Jacques Cartier, bain de foule, retour à pieds… La journée se termine comme elle a commencé, avec des étoiles plein les yeux. Je n’aurai pas pu espérer meilleur retour.

Montréal, et dire que j’ai failli oublier que je t’aimais, que j’ai presque cru que toi et moi, c’était fini! Ah la la… Montréal, Montréal. Tu es tellement pleine de belles surprises.

Image de couverture : Les fleurs de Binette et filles © 2017 Jessica Valoise

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